18 décembre 2021

Calendrier de l’Avent – 18

David Good et Yarima
David Good et Yarima

Pendant toute son enfance, quand les amis de David Good lui demandent où est sa mère, il répond qu’elle est morte dans un accident de voiture. Cette réponse coupe court aux conversations.
Ce qu’il sait de l’histoire de sa mère est bien trop compliqué et douloureux… Comment répondre « Ma mère nous a abandonné, elle vit nue dans la jungle vénézuélienne et mange des tarentules. » ?

Yarima, la mère de David, est membre de la tribu Yanomami du Venezuela. Elle nait et vit dans un village très reculé dans la jungle qui ne voit que très rarement des étrangers, encore moins des occidentaux. Les Yanomamis ne comptent que jusqu’à 2, après c’est « beaucoup », ils n’ont pas de langue écrite, de marché, de devis ni de médicament.

Kenneth, le père de David, est étudiant en anthropologie lors de son premier voyage au Venezuela. Il part dans la partie la plus reculée de la jungle et tombe sur la tribu de Yarima. Captivé et fasciné, il s’y rend régulièrement pendant 12 ans. Les Yanomami le considère comme un des leur et le chef lui offre Yarima en 1978. Elle a entre 9 et 12 ans quand Good en a 36. Lui n’y voit aucun de problème. Il a toujours répondu qu’il agissait comme un Yanomami. Son ancien mentor, Naopléon Chagnon, ainsi que sa famille désapprouvent cette union. Kenneth n’en tient pas compte et organise un mariage à distance avec Yarima depuis les Etats-Unis.

Ses allers-retours loin du Venezula laissent la jeune fille vulnérable aux yeux des hommes de la tribu. Une femme sans mari est une femme sans protecteur. Lors d’un de ses déplacements de 4 mois, la jeune fille est violée par des dizaines d’hommes sur plusieurs semaines. Son lobe d’oreille est presque arraché. Kenneth dira plus tard qu’il a fait une erreur en la laissant si longtemps, qu’il savait que cela pouvait arriver… Suite à cette tragédie, l’anthropologue convainc Yarima de le suivre à Caracas pour avoir des soins, son lobe est sauvé. Elle le suit ensuite en Amérique du Nord.

Yarima est enceinte de David et accouche une semaine après son arrivée. Tout l’univers de l’hôpital la panique, elle tente d’accoucher en s’accroupissant dans un coin de sa chambre.
Après la naissance de leur premier enfant, la famille s’installe dans une maison américaine moderne. La presse s’intéresse à cette histoire, parle de romance, Kenneth est approché pour un livre, une mini-série, un film (qui ne verra jamais le jour). Et pendant ce temps-là, Yarima se sent de plus en plus isolée. Quand Kenneth enseigne et se pavane, elle prend les 20 dollars qu’il lui laisse chaque matin pour aller à Dunkin’ Donuts. Elle doit s’adapter aux vêtements, aux voitures qu’elle prend pour des animaux à l’attaque. Elle est seule et n’a pas d’ami.

En 1991, Kenneth passe un accord avec National Geographic. Toute la famille (avec leur deux nouveaux enfants Vanessa et Daniel) part en Amazonie pour un documentaire. Une fois là-bas, Yarima dit à son mari qu’elle ne retournera pas en Amérique. La question des enfants ne s’est pas posée, le père repart en Pennsylvanie avec eux. Il ne leur a jamais rien expliqué au sujet de leur mère : ni ses origines, ni leur histoire, ni pourquoi elle était partie. David a intériorisé tout ça comme un abandon.

Et puis un jour, alors qu’il a 10 ans, David est en sortie scolaire au Muséum d’Histoire Naturelle. Il y a une petite exposition tribale et juste-là, sur le mur, David voit une photo de sa mère agrandie, prise par son père. L’enfant se fige avant de courir dans un coin se cacher une dizaine de minutes. Il n’en a jamais parlé à Kenneth comme ce dernier ne lui a jamais parlé de cette exposition.
David est perdu. Il déteste sa mère de l’avoir abandonné mais elle lui manque terriblement, et il en veut à son père qui semble le considérer comme une « progéniture expérimentale » en le trimballant de conférence en conférence.

De ses 14 à 21 ans, David sombre dans l’alcool avant de décider d’aller rendre visite à sa mère. Il lit le livre écrit par son père (Yarima mon enfant, ma sœur), découvre un peu plus l’environnement de sa mère et fait en sorte de récolter les 700 dollars nécessaire à son voyage. Il part seul, son frère et sa sœur ne tiennent pas à rencontrer Yarima.

Quand il arrive en août 2011, David est attendu par les Yanomami. Lorsqu’il voit sa mère, il la reconnait immédiatement et ressent qu’il est son fils. La tribu ne pratique pas le câlin comme on le connait, alors David a posé sa main sur l’épaule de Yarima et lui a dit « Maman, j’ai réussi, je suis à la maison. Cela a pris du temps mais je l’ai fait. ». Elle a pleuré.

David est resté 2 semaines et est revenu tout un mois l’année suivante. Il aime s’immerger dans la culture qu’il a si longtemps rejeté. Quand il est dans la jungle, il vit comme tous les autres membres de la tribu, pied nu en sous-vêtements et mange comme eux : des vers, des termites, du boa constrictor, du signe, du tatou… Il a bien évidemment contracté des parasites, fait des intoxications alimentaires mais il est heureux et tient à être Yanomami.

Voici les source directes que j’ai pu trouver au sujet de l’histoire de David, un article du NYPOST et de BBC.

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